. Thucydide
était d’Athènes ; il fut général d’armée en Thrace ; mais, n’ayant pas secouru à temps la ville
d’Amphipolis, attaquée et prise par Brasidas, général des Lacédémoniens, les
Athéniens lui ôtèrent le commandement et le bannirent. Ce fut pendant son exil qu’il écrivit la
guerre du Péloponnèse dont la durée fut 27 ans, et dont il avait partagé les
premiers exploits ; son histoire
n’est conduite que jusqu’à la 21ème
année de cette guère. Nous sommes redevables des 6 années qui la complètent à
Théopompe et à Xénophon.
Le sujet de cet
ouvrage a moins d’intérêt que celui qu’a traité Hérodote, qui avait à décrire
les efforts de la Grèce entière. Son histoire n’offre point comme celle
d’Hérodote des épisodes, des digressions variées : ne voulant rien écrire
qui ne fut vrai, il s’est privé des ressources que le fabuleux fournit à
l’imagination. Quant au style, celui de Thucydide est mâle, élevé et
sévère ; sa diction est serrée et nerveuse. Un mot sous sa plume devient
une sentence. Le style d’Hérodote est tout coulant, harmonieux ; celui de
Thucydide a de plus précision et de véhémence. L’un, dit Cicéron est semblable
à un fleuve tranquille qui roule ses eaux avec majesté ; l’autre est un
torrent impétueux.
On reproche à
l’histoire de Thucydide sa division en années et même en saisons ; en
effet cet historien partage chaque année en deux saisons, l’hiver et
l’été : ce défaut quoique bien moins grave pour l’histoire d’une seule
guerre qui se divise naturellement en campagne qui ne le saurais pour un ouvrage
destiné à embrasser l’histoire d’un peuple ou celle d’une période plus étendue,
a cependant, à part l’inconvénient de la monotonie, celui de suspendre ou de
couper brusquement le récit des événements au moment où l’intérêt est le plus vif, et de manquer ainsi à la
première loi de tout ouvrage, l’unité dans la variété.
On reproche
encore à Thucydide d’avoir introduit l’usage des harangues, bien qu’on les
trouve déjà, mais courtes et sans ornements, dans Hérodote. Nous ajouterons que
le harangues de cet historien ont formé Démosthène, qui les copia dix fois de
sa main pour s’en approprier le style. La plus belle est celle qu’il met à la
bouche de Périclès. Thucydide s’est servi du dialecte Attique.
Le passage le
plus célèbre de cet écrivain est celui
du 2ème livre où il décrit la peste qui fondit sur Athènes l’an 429
avant J.C., et qui enleva Périclès. Lucrèce l’a imité ; mais quelle
différence ! Le poète latin, avec la philosophie désespérante, n’a rien
retracé que des détails hideux ; Thucydide s’est élevé à des considérations
profondes et douloureuses ; il nous peint l’indifférence des Athéniens
pour les affaires publiques qui se brisaient, et son style a la couleur
éloquente de sa pensée.
Parmi les
écrivains de la belle latinité, Salluste et Tacite ont pris Thucydide pour
modèle ; toutefois ils l’ont imité d’une manière différente. Tacite s’est
approprié la couleur de l’historien Grec , sa concision, sa profondeur ;
Salluste s’est conformé à sa manière dans les sentences et dans les phrases.